Je zoom sur un moment précis de ce grand virage opéré il y a 9 ans.
Le moment de ma toute première rencontre avec la Médecine, qui s’est avéré être une purge de tabac vécue en septembre 2015.
Le mercredi est jour de marché à Aix les bains. Je retrouvais mon amie Nathalie comme chaque semaine à la terrasse d’un petit café après que nous ayons fait nos achats habituels.
Un ami à elle devait nous rejoindre. J’avais accepté de le rencontrer car il assiste la chamane qui propose des purges de Tabac non loin de là. Et nous avions convenu qu’il me parlerait de cette cérémonie. En parler, pourquoi pas, bien que je ne comptais pas participer à ce type d’expérience.
Il arrive enfin et prend place à notre table. Il me tient un discours tout à fait inattendu et qui provoque en moi, au fil de son exposé, un saisissement grandissant.
Tout ce qu’il me dit résonne d’une étrange manière…
Voilà pourquoi.
Ayant récemment terminé mes études en sciences politiques, je suis encore pétrie de certaines de mes croyances. Nous avions des cours de macro-économie donnés par un prof dit « de gauche », c’est-à-dire avec une approche humaniste et sensible. A l’opposé du prof de micro économie qui avait une approche très mécanique pour qui l’humain est un acteur totalement déterminé. Un acheteur, un consommateur aisément influençable par des données objectives (une approche qui me glaçait le sang). Bref. Notre prof de macro nous emmenait étudier les échanges économiques au sein des sociétés tribales. Les trobriandais par exemple, tels que décrits par Marcel Mauss. Toujours, j’avais senti que nos sociétés modernes avaient perdu quelque chose que rien de notre soi disant modernité de pouvait compenser. Nous avions perdu quelque chose de profondément essentiel, qui était présent, je le sentais clairement, au sein des sociétés anciennes.
Je me suis toujours refusé à appeler ces sociétés « primitives », mais plutôt primordiales. Je ne savais pas ce qu’était cette chose si importante mais elle avait à voir avec une humilité, une reliance a l’environnement, un goût du sacré, du respect. Une sagesse que nous nous étions empressé de qualifier d’archaïque, simpliste… comme si ces peuples qui nous avaient précédé dans le temps manquaient d’intelligence, et cette arrogance intellectuelle française me répugnait. Cela dit, ce prof avait beaucoup d’estime pour ces populations, mais son jugement restait proche de ce que l’opinion générale convenue dictait de penser.
A la terrasse de notre petit café, j’entends cet ami parler de cette tradition ancestrale pluri millénaire qui consiste à communier avec des plantes sacrées. Et je sens que dans ce geste ancestral de communion, réside une clé fondamentale. La communion avec les plantes était au cœur de tant de sociétés anciennes, elle était le ciment qui maintenait l’ordre… et je ne peux résolument pas penser alors, assise à cette terrasse, que ce geste de communion soit anecdotique ou folklorique. Je sens que c’est par là que se trouve « la preuve » de ce que mon intuition m’a toujours fait sentir, la preuve de leur sagesse, la preuve de leur grandeur, de leur raffinement, de leur intelligence.
Cependant, ce geste de communion ( boire concrètement une décoction de la plante) entre en totale contradiction avec mon approche intellectuelle. Pour moi, seul l’esprit et la raison, à cette éopque , sont les outils de connaissance et de compréhension, et d’invention, etc.
Se pose alors en moi un dilemme clair : soit mon intuition a raison et je me vois offrir la possibilité de le vérifier, mais par un biais qui m’est totalement étranger ; soit ma tête a raison et je refuse de me soumettre à une pratique qui sort de mes habitudes.
Autrement dit, soit je suis mon cœur qui aspire tant à découvrir une vérité mystérieuse, quitte à y laisser ma peau, car cette cérémonie me terrifie au plus haut point ; soit je suis ma tête qui préfère ne pas s’éloigner des sentiers battus.
Après cette rencontre au café, le dilemme continue de se poursuivre en moi. Quelques jours encore. Et puis une issue se précise , de plus en plus, jusqu’à s’imposer.
Si je prends cette plante et que je réalise que je me suis trompée, qu’il n’y a rien, voire que je meurs, et bien c’est ok, car je ne voudrais pas continuer à vivre dans un monde où ce que je cherche n’existe pas.
J’ai appelé cet ami et lui ai fait part de mon intention de particpier à la prochaine cérémonie qui aurait lieu.
Quelques jours plus tard, je me trouvais assise en cercle avec une dizaine d’autres personnes, dans un petit wigwam dans les montagnes suisses. Une femme à l’allure étrange menait la cérémonie, à ses côtés se trouvait cet ami. La chamane venait de chez Takiwasi et proposait en europe des purges au tabac, sous l’étiquette de takiwasi, la maison mère située au Pérou.
Je puis vous assurer que lorsque je me suis retrouvée à tenir mon jus de tabac entre mes deux mains, attendant le signal que nous donnerait cette femme pour que nous buvions tous ensemble notre breuvage, j’étais dans une émotion infinie. Prête à mourir pour l’amour de cette vérité qui m’échappait tant. Et lorsque je montais la tasse à mes lèvres de mes mains tremblantes, mes yeux étaient noyés de larmes. J’ai bu, d’une traite, tout le contenu, puis comme absente à moi-même, je me surprenais à boire mes litres d’eau, vomir, et boire, et vomir, sans plus penser à rien.
Jusqu’à ce qu’il me semble que la purge était finie. J’observais alors les autres autour de moi. Certains ayant eux même déjà fini, d’autres étant encore en processus.
Je me suis sentie étonnamment bien, et relativement étonnée de constater que les choses s’étaient passées avec aisance, et intensité.
Quelques jours plus tard, j’ai vraiment, réellement, concrètement senti quelque chose de nouveau en moi. Quelque chose qui me disait que je venais d’ouvrir une porte sur une autre façon de rencontrer la Connaissance, une autre façon que la logique, la tête et la raison.
C’est ainsi que tout a commencé. Je suis retournée faire une purge le mois suivant, puis le mois d’après également, jusqu’à ce que ce soit la Madre qui m’appelle, une fois, deux fois, puis le kambo, de nombreuses fois… avant de revenir vers la Madre et qu’elle ne m’ouvre une nouvelle porte sur mon âme. Et ce n’était encore qu’un début 😊
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